Notre-Dame-des-Landes : la manifestation dégénère et agite la classe politique

Le rassemblement de samedi dernier à Nantes contre l'aéroport prévu à Notre-Dame-des-Landes a dégénéré et 5 personnes ont été condamnées dès lundi. L'Acipa, association d'agriculteurs proches de la confédération paysanne, est la principale organisatrice mais militants anti-capitalistes et personnalités politiques ont aussi répondu présent : Jean-Luc Mélenchon, coprésident du Parti de gauche, plusieurs représentants d'Europe Ecologie - Les Verts : José Bové, Eva Joly et Christian Troadec, maire DVG de Carhaix et leader des Bonnets rouges. Cécile Duflot, ministre du Logement, avait également fait part de son soutien…de cœur !

A partir de 13h, au moins 20 000 personnes avaient commencé à défiler pacifiquement. Slogans et banderoles fustigeaient clairement le Premier ministre Jean-Marc Ayrault, ancien député-maire de Nantes et fervent partisan du projet : Ayraultport non merci, Non à l'Ayrault porc, Vinci dégage Ayrault aussi, Ni aéroport ni métropole, la ville est à nous.

A un rond-point, clowns et punks à chiens faisait une ronde avant de faire mine de charger vers l'avant. Puis, lors d'un face-à-face entre CRS et tracteurs, des manifestants ont tapé sur les barrages de police en plexiglasEnsuite, de violents heurts ont éclaté. Un millier de protestataires radicaux ont dépavé les voies de tram pour faire provision de projectiles… bouteilles, canettes, billes d'acier, fusées de détresse ont atterri sur les forces de l'ordre qui ont chargé à plusieurs reprises en employant grenades lacrymogènes et lances à eau. Les casseurs ont saccagé un poste de police, une agence du groupe Vinci*, mais ont aussi brisé plusieurs vitrines de magasins, celles d'une agence des transports urbains ou encore d'une boutique Nouvelles Frontières. Au moins deux engins de chantier et une barricade ont aussi été incendiés. Des objets ont été lancés sur les caténaires SNCF afin de bloquer la circulation des trains. Pourtant, la préfecture avait imposé dès vendredi par arrêté une modification du défilé pour éviter le cœur de la ville. Le service de maintien de l'ordre comprenait un millier d'hommes dont des gendarmes mobiles. Des véhicules tractant des canons à eau ou des barricades amovibles avait ainsi été déployés tout autour des rues du centre ville interdites à la manifestation.

A 18h15, les forces de l'ordre ont du lancer une vaste opération destinée à repousser les manifestants encore présents au centre-ville. Certains organisateurs ont dénoncé des provocations des forces de l'ordre, visant à discréditer le mouvement. De son côté, le ministère de l'Intérieur a déploré 6 policiers et gendarmes, blessés sur place. Peu importe ce que dira la préfecture, pour vous tous et toutes c'est un grand succès, a déclaré Julien Durand, porte-parole de l'Acipa, en se plaignant que la manifestation ait été coupée par une intervention des forces de l'ordre. Selon lui, la participation est équivalente aux précédents grands rassemblements : 40 000 personnes (13 000 selon la police…) en novembre 2012. A cette époque, après d'intenses affrontements avec les forces de l'ordre, une première opération d'expulsion des opposants installés sur le site, avait été différée et une phase de concertation et de dialogue destinée à apaiser le débat, avait contenu l'année 2013 dans un calme relatif. Mais à l'approche des municipales et après la publication des arrêtés autorisant la reprise des travaux,les opposants entendaient réaffirmer leur refus du projet. Selon un récent sondage Ifop, 56% des Français sont opposés au futur aéroport, 24% favorables et 20% ne se prononcent pas. 

Le soutien du ministre du Logement écologiste Cécile Duflot aux opposants est à l'origine d'une polémique entre Jean-Marc Ayrault et les écologistes qui s'étend parmi les politiques. Bernard Accoyer (UMP), ex-président de l'Assemblée, a renchérit : le Premier ministre est très affaibli, englué dans cette marée verte qui porte tort à la majorité et empêche le gouvernement d'opérer le tournant que le président de la République a pourtant annoncé. Je reproche au Parti socialiste et à François Hollande d'accepter dans la majorité des gens qui, manifestement, n'ont pas le même respect vis-à-vis des règles de notre société. EELV (Europe Ecologie Les Verts) ont soutenu une mobilisation dont on savait qu'elle allait contenir des gens dangereux. Il y a une sorte d'affranchissement vis-à-vis des règles de la démocratie. Plus que le FN ? Ils n'ont pas grand chose en commun si ce n'est qu'ils sont en dehors du pacte républicain, oui je le pense.
François de Rugy,co-président du groupe écologiste à l'Assemblée, a répliqué, interpellant Christian Jacob, président du groupe UMP à l'Assemblée et à Jean-François Copé, président de l'UMP, les appelant à se désolidariser au plus vite et à condamner le discours de Bernard Accoyer… Nous avons toujours été contre le projet Notre-Dame-des-Landes. Sur le fond, ce n'est pas une surprise. Sur les modes d'action, nous avons toujours été très fermement opposés à tout acte de violence. Je proteste très fortement contre ces propos qui sont inadmissibles et extrêmement choquants,
Daniel Cohn-Bendit, député européen d'Europe Ecologie-Les Verts, a lui aussi rétorqué sur BFMTVles politiques ont le droit de dire n'importe quoi mais je ne vois pas pourquoi je vais perdre mon temps. Ce genre de réflexion à propos des Verts n'est pas à la hauteur intellectuelle du débat nécessaire. Je trouve cela ignoble et inadmissible de comparer les Verts au Front national mais ça, ça regarde M. Accoyer… A le droit d'être débile qui veut, a conclut Daniel Cohn-Bendit.

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`*Vinci : Concessionnaire du projet aéroport