Mittal devant la commission d’enquête sur la sidérurgie

Auditionné ce 17 avril à l'Assemblée nationale devant la commission d’enquête sur la sidérurgie*, Lakshmi Mittal, en retard d'une demi-heure et invoquant des infrastructures à revoir, a dispensé un cours d'économie ultralibérale aux député sidérés.

Le PDG d'Arcelor a, en effet, conseillé à l'Europe de prendre des mesures protectionistes : Comment faire pour concurrencer les productions russes et chinoises qui en plus sont soutenues par leur gouvernement ? a-t-il lancé en dénonçant ensuite les coûts de production en Europe trop élevés comparés au 3 dollars de l'heure payés en Chine. Il a également fustigé le temps de travail trop faible dans l'Hexagone, arguant pour une plus grande souplesse du droit du travail et des syndicats.

Le groupe Arcelor Mittal emploie 20 000 personnes en France…

Lakshmi Mittal n’a pas répondu aux questions insistantes mais dérangeantes sur le sort des intérimaires de Florange et des salariés ne travaillant pas directement pour ArcelorMittal, sur les montants qu’il a récupérés du CO2, des crédits d’impôts ou du chômage partiel.

Sur le projet de production d’acier vert, LIS, qui succède à Ulcos, Lakshmi Mittal a souligné que les études n’auront de traduction industrielle que si c’est viable économiquement. Il a rappelé que la demande d’acier avait plongé de 30% en Europe depuis 2007, une situation qui a rendu nécessaire de reconfigurer son dispositif industriel en France et en Europe afin de répondre à la demande du marché de la manière la plus compétitive qui soit.

Pour le site de Florange, où les deux hauts-fourneaux ont été mis sous cocon le 11 avril, le géant de la sidérurgie a exclu une aciérie électrique à Florange pas compétitive selon lui en raison de coûts de l’énergie qui seraient 30 fois supérieurs à ceux de l’Allemagne.

La stratégie du groupe Arcelor Mittal consiste à concentrer la production de fonte dans les sites portuaires. Fos et Dunkerque devraient donc bénéficier d'investissements nécessaires à leur développement. Le PDG n’en a pas chiffré les montants mais a exposé son intention de faire également de ses usines continentales des centres d’excellence bénéficiant d’une position stratégique, à proximité des clients, évoquant une capacité de recherche et d’innovation en France parmi les meilleures au monde… Cette flatterie dans le sens du poil a été rapporté par Jean Grellier, le président de la commission et député PS des Deux-Sèvres, au sortir du huis clos.

La presse avait été exclue de la salle des Quatre Colonnes où se déroulait l'entretien sur demande de M. Mittal. ll a seulement accordé trois minutes aux photographes, pour des images de com, souriant dans sa chemise blanche et cravate assortie au costume bleu, à côté de son vice-président et sinistre ex-directeur de Florange, Henri Blaffart.

Apparamment convaincu par Mittal, au moins sur la nécessité du protectionnisme, Jean Grellier s'est déclaré inquiet que dans 20 ou 30 ans, il n’y ait plus de sidérurgie en Europe s’il n’y a pas des actions concrètes et fortes de fermeture des frontières. La politique industrielle européenne doit être repensée avec des enjeux de protection de notre modèle, a conclu le président de la commission.

*25 députés composent la commission d’enquête parlementaire sur la sidérurgie et l’avenir de l’industrie, lancée le 23 janvier dernier. Elle est présidée par le député PS Jean Grellier et coprésidée par le député PS de la Fensch, Michel Liebgott.