France : Etats généraux de l’alimentation

Promis par Emmanuel Macron lors de la campagne présidentielle, les états généraux de l’alimentation ont pour objectif de tenter de réconcilier la filière agricole française, divisée et confrontée à une grave crise.

Les différents acteurs, réunis à partir de ce 20 juillet, doivent trouver comment obtenir un partage équitable de la valeur ajoutée des produits.

Les enjeux essentiels sont de permettre aux agriculteurs de vivre dignement, de freiner la guerre des prix dans la distribution tout en répondant aux nouvelles attentes des consommateurs en recherche de qualité.

Producteurs, industriels, distributeurs, associations de consommateurs et ONG environnementales se fixent jusqu’à novembre pour dégager des solutions concrètes.

Ces états généraux sont une chance, estime Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération des entreprises du commerce et de la distribution. Le grand sujet c’est le revenu des agriculteurs : comment faire pour qu’ils s’en sortent mieux ? La politique agricole commune (PAC) est devenue trop libérale et ne permet pas de les aider suffisamment à faire face aux accidents conjoncturels, qui existeront toujours.

De la fourchette à la fourche et pas le contraire

La deuxième priorité est de partir des besoins : aujourd’hui, les consommateurs veulent du bio, du sans gluten et des produits locaux. La production agricole française ne correspond pas toujours. Par exemple, le porc bio est payé 3,50€/kg contre 1,60 € en conventionnel et, pourtant 80 % est importé, comme la totalité des pêches plates ou du raisin sans pépin.

Les industriels doivent tenir compte des coûts de production sans être déconnectés des marchés mondiaux. Pour vivre dignement, les agriculteurs doivent pouvoir se regrouper pour négocier avec les distributeurs. Cela existe pour le lait mais pas pour les fruits et légumes. En France, les PME agroalimentaires sont présentes sur tous les marchés en croissance. Mais avec un droit commercial le plus instable du monde : 6 lois ont été votées en 13 ans ! Il faut des règles plus simples et claires.

Depuis 2 ans, les prix sont inférieurs aux coûts de production. Les industriels ne payent pas suffisamment les producteurs donc leurs revenus se sont dégradés. La moitié vit avec moins de 350€ /mois ! Ça ne peut plus durer dénonce Christiane Lambert présidente de la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles (FNSEA), premier syndicat agricole, qui demande d’éviter un usage abusif des promotions qui font perdre la notion du prix juste.Le dogme du prix bas imposé par les distributeurs tue les paysans ! rappelle-t-elle.

Nous sommes dans un état d’esprit constructif et déterminé à redonner de la valeur à notre alimentation et renforcer la confiance des consommateurs.

Il y a une urgence sur le plan économique, affirme Catherine Chapalain, directrice générale de l’Association nationale des industries alimentaires. L’ensemble de la filière alimentaire représente 2,5 millions d’emplois et 650 milliards d’€ de chiffre d’affaires.

Le potentiel d’exportation est important pourtant seules 2/8 entreprises françaises le font, regrette-t-elle. En Allemagne, c’est 8/10. Le secteur traverse une crise sans précédent avec un décrochage de la compétitivité, déplore-t-elle. La guerre des prix détruit de la valeur. La plupart des distributeurs reconnaissent d’ailleurs que l’on va dans le mur, convient-elle…

Depuis 1960, le nombre d’exploitations agricoles n’a cessé de diminuer. Pour freiner la disparition des exploitations, il faut arrêter de bétonner le foncier mais il faut aussi que les agriculteurs aient des revenus, insiste Christiane Lambert.. Le maintien du pouvoir d’achat s’est fait au détriment des agriculteurs, fustige-t-elle. Les gens veulent plus bio mais plus c’est vert, plus c’est cher… argumente-t-elle Pour maintenir une agriculture en France, il faut payer le prix ! insiste-t-elle.

Si la plupart des abricots et des melons viennent d’Espagne, c’est parce que c’est moins cher. D’ailleurs le porc conventionnel est lui aussi importé à 80 %… Les 17 000 entreprises de l’agroalimentaire sont une richesse. Afin de mieux répondre aux attentes, il est nécessaire, selon elle, de maintenir une diversité dans l’agriculture et dynamiser le bio, un secteur où nous ne sommes pas autosuffisants.