Pologne : avortement interdit ?

En Pologne, la législation sur l’avortement est déjà l’une des plus restrictives d'Europe. Or, le Parlement polonais  se prépare à durcir encore les conditions d’accès à l’IVG.

Le texte interdit l'avortement à une exception près : lorsque la vie de la femme enceinte est en danger immédiat.

La version du projet prévoit également jusqu’à 5 ans de prison pour les médecins ou autres personnes pratiquant l'IVG comme pour les patientes même s’il laisse l’option de cette peine à l’appréciation du juge. Ces modifications ont déclenché la colère d’une partie dans population : à Varsovie et à travers tout le pays, des milliers de femmes, vêtues de noir, sont descendues dans la rue ce lundi 3 octobre pour défendre leurs droits.

Sur les banderoles, des images de vagins faisant un doigt d’honneur ou un cintre, symboles d’instruments de torture pour avorter.

Mot d'ordre : Grève des femmes contre la proposition de loi !

L’opposition dénonce les risques pour la santé des femmes car elles ne renonceront pas à l’avortement mais seront contraintes à des pratiques clandestines et dangereuses. En Pologne, selon les statistiques officielles, moins de 2 000

IVG légales/an sont recensées mais les militants estiment le nombre d'interventions clandestines à plusieurs dizaines de milliers, dont celles pratiquées en Allemagne ou en Slovaquie, pour celles qui en ont les moyens.

Des personnalités de la société civile ont décidé d’agir auprès de l'UE. Barbara Nowacka représentante de Sauvons les Femmes est attendue à Bruxelles. Nous avons le droit d’exiger les mêmes droits que nos voisins européens. L’Europe doit réagir à ce qui se passe en Pologne et ailleurs, a déclaré à France 24, Paulina Piechna-Wieckiewicz, membre du SLD pour l’Alliance de la gauche polonaise. Le Parlement européen se prononcera mercredi. Jusqu’à présent, jamais aucun pays membre de l’Union européenne n’était revenu sur le droit à l’avortement : en 2014, l’Espagne avait envisagé, de restreindre l’accès à l’IVG mais avait renoncé en raison des vives protestations. Quant à Malte et en Irlande, l’IVG a toujours été interdite…

Le droit à l'IVG devrait être inscrit comme un droit fondamental dans la Convention européenne des droits de l’Homme. Seuls les esclaves ne disposent pas de leur corps…

Ce qui se passe en Pologne doit nous faire réfléchir, alerte Anne-Cécile Mailfert, auteure de Ils ne décideront plus pour nous !, essai sur le combat pour le droit à l’avortement en France où l’accès à l’avortement est légal mais pas inscrit dans la Constitution. Ce droit est fragile, s’inquiète-t-elle, interrogée par France 24. Il suffirait qu’une majorité émerge contre l’IVG pour que la loi qui l’autorise soit remise en question par nos parlementaires, estime la militante française qui sollicite l’intervention de l'Union européenne pour que le droit à l’avortement soit inscrit comme une liberté fondamentale au même titre que l’abolition de la peine de mort, ce qui légitimerait de fait une saisie de la Cour européenne pour lequel les États européens risquent l’exclusion. Pour l’instant, l’accès à l’IVG relève de la compétence de chaque État membre…