Brésil : Manifestations monstres contre Dilma Rousseff, la présidente accusée de corruption

3 millions* de brésiliens, dont 1,4 million à Sao Paulo, ont défilé ce 13 mars 2016, aux cris de Dilma dehors !, réclamant le départ de la présidente brésilienne de gauche.

En dehors du scandale de corruption Petrobras, les Brésiliens sont exaspérés par la récession économique et la crise politique qui paralysent le pays depuis plus d'un an. L'opposition attendait une mobilisation massive de la rue pour faire pression sur les députés, pour ou contre la présidente, Dilma Rousseff, réélue démocratiquement en 2014). Ses espérances ont été comblées !

Le week-end pourri de Dilma Rousseff

Déjà, 12 mars, le Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB) centriste, première force parlementaire du pays et pilier), annoncé se donner 30 jours pour décider s'il quitte la coalition au pouvoir avec le Parti des travailleurs (PT). Le PMDB est très divisé entre partisans du maintien du pacte gouvernemental et adeptes d'un divorce potentiellement fatal à Dilma Rousseff.

Samedi également, le PMDB a reconduit à la direction Michel Temer, vice-président brésilien, qui assumerait la présidence jusqu'aux élections de 2018, en cas de destitution de la présidente actuelle.

Le prix à payer pour soutenir le gouvernement est très élevé et les politiciens en sont conscients… Personne ne va vouloir couler avec le PT au pouvoir, commente un analyste.

Depuis décembre, Dilma Rousseff est sous la menace d'une procédure d'impeachment lancée au parlement par l'opposition qui l’accuse d'avoir sciemment maquillé les comptes publics en 2014 pour minimiser les déficits et favoriser sa réélection.

Le Tribunal suprême fédéral (STF) a freiné la procédure qui a sommeillé durant les vacances de l'été austral, puis le carnaval... Mais le STF doit fixer les règles de son cheminement ce mercredi. Or, Eduardo Cunha, PMDB, président du Congrès des  députés et adversaire farouche de Dilma Rousseff, a annoncé qu'il n'attendait que cela…

La présidente a tenu une réunion dimanche soir à Brasilia avec les principaux membres de son gouvernement pour analyser la situation. La bataille n'est pas forcément perdue car l'opposition et le PMDB n'ont pas encore mis au point leur stratégie après-Dilma.. Aecio Neves, chef de l'opposition, n'est pas particulièrement favorable à un impeachment qui mettrait le PMDB au pouvoir jusqu'en 2018…

Le président du Parti-social démocrate brésilien (PSDB, centre-droit) a préféré inviter Dilma Rousseff à démissionner, dans un geste magnanime, de générosité pour le pays. Autre option pour lui : que la justice électorale casse le mandat de la présidente et du vice-président Temer pour financement illégal de leur campagne par Petrobras. 

Dans les deux cas, de nouvelles élections seraient immédiatement convoquées et il en serait le favori ! Cependant, la procédure en cours devant le Tribunal supérieur électoral (TSE) est (très) lente, et son issue plus incertaine qu’une destitution.

D’ailleurs, Dilma Rousseff a prévenu qu'elle n'avait aucune intention de démissionner. Elle n'a plus qu'un atout pour tenter de renverser la situation : elle a prié Luiz Inacio Lula da Silva, son mentor et prédécesseur (2003-2010), d'intégrer le gouvernement. L'ancien ouvrier métallurgiste et leader syndical, président du miracle socio-économique brésilien des années 2000, a conservé une aura et d'un talent politique sans équivalent au Brésil. Mais si son entrée au gouvernement le mettrait à l'abri de la justice il pourrait passer pour une dérobade face à ses récents déboires judiciaires. Lula hésite donc à se présenter à la présidence en 2018 et n'a pas encore donné sa réponse.