Tunisie : une nouvelle constitution 3 ans après la révolution

La Tunisie a été la première à se rebeller contre un pouvoir autocratique et corrompu. Le pays a inspiré le vent de contestation démocratique qui s'est élevé en Egypte puis propagé en Libye, en Syrie, au Yemen, au Bahrein et rebaptisé Printemps Arabes par l'Occident…

Le projet de la nouvelle Constitution, en chantier depuis deux ans, devrait être adoptée à la date symbolique de ce 14 janvier 2014, soit le troisième anniversaire de la chute de Ben Ali. L’ancien chef d’Etat avait du s’exiler en Arabie Saoudite, car ni la France ni aucun autre pays arabe ne voulait l’accueillir…

Après l’immolation par le feu, le 17 décembre 2010, du jeune marchand ambulant Mohamed Bouazizi, qui protestait contre la confiscation de ses marchandises par la police, à Sidi-Bouzid, (centre), la révolution a été faite par les jeunes chômeurs diplômés : 80% des manifestants. Il y a toujours autant de chômeurs…

Les inégalités régionales, une des raisons du soulèvement contre l’ancien régime, demeurent. Le pays tente de sortir d'une période de transition difficile : blocages politiques, crise économique, insécurité...


Ces derniers jours, dans la région du centre-ouest, des manifestants protestaient contre les mauvaises conditions de vie. Ils ont exprimé leur refus d’une série de taxes sur les moyens de transports privés et professionnels. Les forces de l’ordre ont fait usage de gaz lacrymogène.

Le 8 janvier, une grève générale à l’appel du syndicat de l’UGTT a été organisée à Kasserine pour le troisième anniversaire de la mort du premier habitant de la ville lors du soulèvement en 2011. Des dizaines de manifestants ont tenté de s'introduire de force dans le siège d'Ennahdha*. A Thala, située dans la même région, un poste de police a été partiellement incendié par des manifestants.

Nous sommes là pour protester contre le sous-développement et la situation socio-économique médiocre dans notre région, a déclaré le syndicaliste Sadok Mahmoudi. La classe politique doit savoir que nous tenons toujours à la réalisation des objectifs de la révolution : dignité, liberté, et travail. Trois ans après, ils sont loin d'être atteints… Les bannières et les cris restent identiques : Le peuple veut la chute du régime, Pauvre peuple, ils* t’ont bien eu au nom de la religion… 

L’Assemblée nationale constituante a été élue le 23 octobre 2011. Présidée par Mustapha Benjaafar, leader du parti Attakatol**, elle comporte 217 membres. Une commission spéciale, réunissant 22 d'entre eux, a travaillé à la quatrième version du nouveau projet de constitution. Projet voté article par article avant son approbation définitive à la majorité des deux tiers des membres de l’ANC.

Les débats autour de certains articles du texte ont entrainé la mobilisation des opposants : partis, ONG, femmes, jeunes,… Votée dans une Assemblée dominée par des islamistes d'Ennahada, la nouvelle Constitution a pourtant tourné le dos à la Charia, le droit islamique.

Ennahda* a abandonné tous ses portefeuilles ministériels et le premier ministre, Ali Larayedh, a démissionné jeudi 9 janvier. Son départ avait plusieurs fois été reporté depuis le meurtre de l’opposant politique Mohamed Brahmi. ll est remplacé par Mehdi Jomaâ, ministre de l’Industrie, sans étiquette partisane. Chafik Sarsar, professeur de droit constitutionnel président de l’Instance supérieure Indépendante pour les Elections élu par l'ANC a pour mission de préparer les textes relatifs aux élections législatives et au scrutin présidentiel prévue pour 2014.


Ennahdha* : parti islamiste au pouvoir


Ettakatol** parti social démocrate pour le travail et les libertés