Le français : langue la plus parlée au monde en 2050 ?

Le français pourrait devenir la langue la plus parlée dans le monde d’ici 2050, selon une étude de la banque d’investissement Natixis.

La tendance du discours étant plutôt orientée vers les plaintes sur l’appauvrissement de la langue et le déclin de la France, de tels résultats surprennent… La perspective de voir à la fois l'hégémonie de l'anglais céder du terrain et le mandarin dépassé en nombre de pratiquants, a de quoi laisser rêveur et perplexe.

Pourtant, en quelques décennies, la langue de Molière supplanterait celle de Shakespeare, surtout grâce à … l’Afrique !

En effet, selon les projections démographiques, la proportion de francophones dans le monde pourrait passer à 8 % en 2050 contre 3 % actuellement.

Une progression due à l’ancrage de la langue française dans des zones très dynamiques démographiquement. D’après l’Ined (Institut d’études nationales démographiques), la population en Afrique devrait passer de 800 millions en 2010 à 4,5 milliards en 2100. En 2050, 85 % des personnes parlant français vivraient en Afrique. Selon le géographe Michel Foucher*, l’Afrique comptait en 2010, 12 pays dont le Français est la langue officielle, et 15 dont c’est la 2e langue officielle et souvent, la langue d'usage au Maghreb. L’Afrique subsaharienne est le noyau dur de la francophonie, et c’est celui qui va le plus augmenter à l’avenir, estime Alexandre Wolff, responsable de l’Observatoire de la langue française.

Toutefois, certains spécialistes, estiment les prévisions de Natixis sont nettement surévaluées… Partielles, voire partiales, elles n'intègrent pas les freins à cette progression linguistique. Michel Foucher* pointe l'absence de projections pour les Etats anglophones… D'autre part, l'étude présuppose que les habitants des Etats où le français est la langue officielle parlent tous français… Or c'est faux ! Les langues régionales sont de plus en plus importantes, insiste le géographe.

Obtenir des résultats aussi optimistes rapidement impliquerait un effort considérable car, la France n’assure actuellement que 1 % l'enseignement du français grâce à ses établissements à l'étranger, le reste reposant sur les moyens et la volonté politique des Etats, conclut-il.

Selon Michel Guillou, directeur de l’Institut pour l’étude de la francophonie et de la mondialisation, le Français pourrait aussi souffrir de la trahison des élites (Tribune du Figaro du 19/03). Les décideurs français n’ont plus la volonté d’utiliser leur propre langue à l’étranger. Ils n’arrêtent pas de dire que ce n’est pas une langue moderne, et s'expriment anglais… relève-t-il dans un entretien avec les Inrocks. Dès lors, les Africains ont de quoi s’interroger : pourquoi continuer d’apprendre cette langue, imposée pendant la colonisation ? De plus, si on veut développer le français, il y faudrait un Airbus francophone éducatif, pour former les maîtres, souligne Michel Guillou.

En Europe, d’une manière générale, et contrairement à ce qui est annoncé, l’apprentissage des langues a tendance à se réduire à l’anglais, remarque Alexandre Wolff, responsable de l’Observatoire de la langue française et le français dans les organisations internationales est en constante régression depuis une vingtaine d’années, au profit d’un anglais nécessairement appauvri.

Pour devenir la langue la plus parlée au monde, le français a certes une longue route à parcourir avant de dépasser l'anglais, son concurrent. Mais malgré ces réserves, il reste vrai que le français bénéficie d'une dynamique ascendante. Eparpillé géographiquement : France, Belgique, Suisse, au Québec, et pays d’Afrique subsaharienne, il enseigné partout dans le monde. Le français est la langue officielle ou co-officielle de 29 pays dans le monde contre 56 pour l’anglais. Selon Alexandre Wolff, langue française, le français se situe dans les 5 premières langues mondiales. L’anglais et le français peuvent prétendre au rang de langues mondiales car ce sont les seules qui sont présentes sur les 5 continents, rappelle-t-il, en détaillant le potentiel de croissance de la langue française : Il y a une forte dans les pays d’Afrique non-francophone, qui en ont besoin pour commercer avec leur environnement proche. Et, les investisseurs chinois en Afrique doivent apprendre le français pour les affaires. Et en Chine, dans l’enseignement supérieur, beaucoup d’étudiants apprennent le français pour pouvoir poursuivre des études dans des pays francophones, dont les systèmes éducatifs sont bien cotés, argumente Alexandre Wolff.


*Michel Foucher, géorgraphe à l'Observatoire de la langue française, auteur de l’Atlas de l’influence française au XXIe siècle. Editions Laffont