Libye : réactions internationales face à la sanglante répression

altAu lendemain d'une sévère mise en garde lancée par Seif al-Islam, le fils de Kadhafi, évoquant un risque de bain de sang, une répression meurtrière était en cours en Libye.

Les autorités libyennes ont fourni mardi soir pour la première fois un bilan officiel des victimes: 300 morts, dont 242 civils et 58 militaires.

Benghazi (104 civils et 10 militaires tués), Al-Baïda (63 civils et 10 militaires) et Derna (29 civils et 36 militaires) sont les villes les plus touchées, toutes situées dans l'est, région pétrolifère de la Libye.

Les violences meurtrières, d'abord concentrées à l'Est, ont touché Tripoli dimanche soir, alors que le calme était revenu à Benghazi lundi.

D'après l'organisation Human Rights Watch (HRW), la répression a déjà fait au moins 640 morts.

Des témoins racontent

Les milices, les forces de sécurité fidèles à Kadhafi sévissent de façon terrible, cassent les portes, pillent (...).Il est impossible de retirer les corps dans les rues, on se fait tirer dessus, a expliqué la présidente de la Fédération internationale des ligues de droits de l'Homme, Souhayr Belhassen.

Des Tunisiens ayant fui le pays ont raconté des nuits de terreur à Tripoli, les hommes de Kadhafi et des mercenaires tirant dans tous les sens, arrêtant, braquant, violant.
Des habitants de Fachloum et de Tajoura, quartiers de la banlieue de Tripoli, avaient fait état lundi soir de véritables massacres.

Selon des témoignages les combats ont cessé mardi à Benghazi.

A Tripoli , beaucoup d'étrangers restaient confinés chez eux. L'aéroport était bondé, et de nombreux pays ont annoncé l'envoi d'avions ou de navires pour évacuer des ressortissants.

Mardi soir, lors d'une allocution télévisée d'une heure et demie, Kadhafi menace son peuple d'une répression sanglante


Drapé dans une tunique marron, il s'exprimait devant sa maison bombardée en avril 1986 par les Américains et laissée depuis en l'état.

Nous n'avons pas encore fait usage de la force, mais si la situation requiert le recours à la force, nous y recourrons, a pourtant assuré Mouammar Kadhafi dans son discours…

il a appelé l'armée et la police à reprendre la situation en mains. Il a affirmé qu'il resterait en Libye en tant que Chef de la révolution.

Tous les jeunes doivent créer demain les comités de défense de la révolution: ils protègeront les routes, les ponts, les aéroports, a-t-il dit, en appelant ses partisans à manifester à partir de mercredi.
Aucun fou ne pourra couper notre pays en morceaux, a ajouté le colonel, menaçant de purger (le pays) maison par maison.

Kadhafi, confronté à une révolte populaire sans précédent depuis une semaine, a juré de rétablir l'ordre,
promettant de se battre jusqu'à la dernière goutte de son sang, tout manifestant armé méritant la peine de mort.
Rendez vos armes immédiatement, sinon il y aura des boucheries, a-t-il lancé, enflammé !

Plusieurs dirigeants libyens ont fait défection

Sur Al-Jazira,mardi soir, le ministre de l'Intérieur, Abdel Fatah Younes, a déclaré se rallier à la révolution.
J'appelle toutes les forces armées à répondre aussi aux demandes du peuple qui réclame le départ du colonel Kadhafi, en solidarité, a ajouté le ministre vêtu d'un uniforme militaire. De hauts responsables libyens, ministres, diplomates ou militaires ont déjà démissionné pour marquer leur opposition à la répression sanglante du mouvement de contestation.

Réactions internationales

Réuni en urgence, le Conseil de sécurité de l'ONU a demandé la fin immédiate des violences en Libye et condamné la répression des manifestants engagée par le régime du colonel Mouammar Kadhafi. La Ligue arabe a annoncé que la participation de la Libye à ses réunions était suspendue jusqu'à ce que les autorités libyennes acceptent les revendications" du peuple libyen et assurent sa sécurité
La haut commissaire de l'ONU aux droits de l'Homme, Navi Pillay, a averti les autorités libyennes que les attaques systématiques contre la population civile pourraient être assimilées à des crimes contre l'humanité.

La secrétaire d'Etat américaine, Hillary Clinton, a parlé d'un bain de sang totalement inacceptable et plusieurs élus du Congrès des Etats-Unis ont demandé des sanctions contre le régime libyen.

Les Européens étaient divisés sur d'éventuelles sanctions. Certains pays redoutant un retour de bâton contre leurs ressortissants sur place ou une vague importante d'immigration. Rome craint ainsi de voir affluer entre 200 à 300 000 migrants si la Libye cesse de bloquer les départs.

En Amérique latine, le Pérou a rompu le premier ses relations diplomatiques avec la Libye pour protester contre la répression.

Le Nicaragua et Cuba se sont tenus à distance de la condamnation internationale.

L'escalade meurtrière en Libye, important producteur mondial d'or noir, a fait flamber les cours du pétrole

La Libye est le 4e producteur de pétrole en Afrique.

Deux facteurs sont à l'origine de la récente envolée des prix : la spéculation et la situation politique au Moyen-Orient, selon des ministres de l'Opep, qui ont assuré que le cartel était prêt à combler d'éventuelles pénuries même s'il estime que le marché est suffisamment approvisionné.

En revanche, le seul gazoduc reliant la Libye à l'Italie et à l'Europe a été coupé mardi.

Le prix du baril de pétrole a fini mardi à 93,57 dollars à New York, en hausse de 8,5%.

A Londres, le baril de Brent de la mer du Nord avait atteint 108,57 dollars, du jamais vu depuis septembre 2008.

Titres de La Presse en France, le 23 février

LE MONDE : La diplomatie française bousculée par la revolte arabe
Comment l'Elysée et le Quai d'Orsay tentent de reformuler une politique.

L'ENRAGé titre LIBERATION Dans un discours halluciné, Kadhafi a menacé les Libyens qui réclament son départ d'une boucherie

LE FIGARO  : Le délire meurtrier de Khadafi
Le dirigeant libyen a menacé son peuple d'une boucherie et juré de mourir en martyr plutôt que de céder le pouvoir

L'HUMANITE : Les Mains Sales. Le propos est illustré d'une photo du président français serrant la main du dictateur libyen. Kadhafi a prononcé hier un discours d'une extrême violence. L'est de la Libye est aux mains des insurgés. La politique étrangère de Nicolas Sarkozy est mise en accusation.

LA CROIX : Déroute en libye. Alors que le régime de Kadhafi a perdu le contrôle d'une partie du pays et que les défections de responsables se multiplient, la répression reste féroce à Tripoli

LE PARISIEN: Les Français fuient le chaos
à l'heure où les diplomates parlent de crimes contre l'humanité, Kadhafi a promis une répression plus féroce encore et même de purger la Libye maison par maison. La France décide de rapatrier ses ressortissants.

LES ECHOS : La revolte de la Libye fait bondir les prix du pétrole :le prix du super pourrait vite retrouver ses sommets de 2008